PASCALE OBOLO
Electronic Protest Song As Resistance Through the Creation of Sound
Ou l’acte de résister par la création sonore
Mo Laudi’s work defines itself through the sonic concept of an Afro-electronic Protest Song, an act of resistance through the creation of sound, pushing the limits by learning the rules in order to break them in new ways, and caring for the other. This willingness to go beyond, this willingness to do things differently to regenerate a new vision of an idea that has not yet been formulated – I think that is where the magic operates. The power of music which so easily immerses us, of sound installations, painting, digital art, dance, film and storytelling bring us moments of enjoyment and unique bodily transformation. In these times of global health crisis, there is an urgent need to repair bodies, to awaken minds, to reinvent ourselves, to break the silence, to express cries of revolt in order to repair injustices – to politically and artistically transform the bodies of Africans, inspired by the Zulu philosophy of Ubuntu, which is defined as “I am because we are”.
Le travail de l’artiste Mo Laudi se définit par le concept sonore d’Afro-electronic Protest Song qui se caractérise par l’acte de résister par la création sonore, de repousser les limites en apprenant les règles pour les briser d’une façon nouvelle, de prendre soin de l’autre. Cette volonté d’aller au-delà, cette volonté de faire des choses différemment pour régénérer une nouvelle vision d’une idée qui n’a pas encore été formulée. Je pense que c’est là que la magie s’opère. Le pouvoir si facilement immersif de la musique, des installations sonores, de la peinture, des arts numériques, de la danse, des films en fonction des histoires racontées, nous fait ressentir des moments de jouissance et de transformation corporelle unique. En ces temps de crise sanitaire planétaire, il y a urgence de réparer les corps, de réveiller les esprits, de se réinventer, de briser le silence, d’exprimer des cris de révoltes pour réparer des injustices—de transformer politiquement et artistiquement les corps des Africains en s’inspirant de la philosophie zoulou Ubuntu qui se définit par « Je suis parce que nous sommes ».
Mo Laudi’s Globalisto project is based on this philosophy. It inspired him to create an Afro-House track called The Rebirth of Ubuntu in 2017. Above all, he likes to set up rhizomic ramifications[1]Edouard Glissant, Introduction to a Poetics of Diversity, 1996. between his production label and his own sound making. That is to say, creating a community consisting of a plural identity according to Edouard Glissant’s concept: “…the rhizome places identity in the capacity of elaborating composite cultures, through the networking of external contributions, compared to the single root that annihilates.”
Le projet du label Globalisto de l’artiste Mo Laudi est basé sur cette philosophie. Il s’en est d’ailleurs inspirée pour créer un morceau d’ Afro-House nommé : The Rebirth of Ubuntu en 2017. Il aime avant tout mettre en place des ramifications rhizomiques[2]Edouard Glissant, Introduction à une Poétique du Divers, ed. Gallimard, 1996. entre son label et sa production sonore. C’est-à-dire créer une communauté se composant d’une identité plurielle selon le concept d’Édouard Glissant : « …le rhizome place l’identité en capacité d’élaboration de cultures composites, par la mise en réseau des apports extérieurs, là où la racine unique annihile. »
What is at play behind the many productions and artistic collaborations of South African artist, composer, producer and DJ, Mo Laudi? There is a vital need to be in dialogue with the planet, to summon the spirits of our elders, to connect man with nature, to bring together creators to form a Globalisto community. Mo Laudi’s artistic practice is like looped music in perpetual motion that deconstructs mental and racial boundaries.
Qu’est-ce qui se joue derrière les nombreuses productions et collaborations artistiques mise en place par l’artiste, compositeur, producteur et DJ sud-africain, Mo Laudi? Cette nécessité vitale d’être toujours en dialogue avec la planète, de convoquer les esprits de nos anciens, de connecter l’homme à la nature, de fédérer des créateurs afin de créer une communauté dans son projet de label Globalisto ? Le travail artistique de Mo Laudi est une boucle de musique en mouvement perpétuel qui déconstruit les frontières mentales et raciales.
In this exhibition project Salon Globalisto, Mo Laudi places himself like a conductor. He invites the polymorphous voices of fifteen activist artists (Dineo Seshee Bopape, Mbali Dhlamini, Kendell Geers, George Hallett, Rodan Kane Hart, Porky Hefer, Thonton Kabeya, Khehla Chepape Makgato, Chris Saunders, Gerard Sekoto, Penny Siopis, Claudia Tennant, Sammy Valhalla, Nontsikelelo Veleko, Lulama Wolf) who present paintings, sculptures, photographs, works on paper, videos and sound. Mo Laudi advocates a musical pan-Africanist philosophy that aims to break down musical boundaries on the continent and beyond.
Dans ce projet d’exposition Salon Globalisto, Mo Laudi se place en chef d’orchestre. Il invite des voix polymorphes d’une quinzaine d’artistes militants (Dineo Seshee Bopape, Mbali Dhlamini, Kendell Geers, George Hallett, Rodan Kane Hart, Porky Hefer, Thonton Kabeya, Khehla Chepape Makgato, Chris Saunders, Gerard Sekoto, Penny Siopis, Claudia Tennant, Sammy Valhalla, Nontsikelelo Veleko, Lulama Wolf) qui présentent peintures, sculptures, photographies, œuvres sur papier, vidéos et son. L’artiste Mo Laudi défend une philosophie musicale panafricaniste qui entend abolir les frontières musicales sur le continent et hors continent.
Within his musical sound practice, the concept of Pan-Africanism represents a limitless Black creative space where you are invited to sing, dance, travel to to “resurrect ancient knowledge, symbols, visuals and sounds, while inventing those of the future”. Mo Laudi links his own mixes (archives) to construct a soundscape that forms trans-Atlantic parallels connected via South Africa to the universe, interrogating the shared pan-African experience of appropriation, exploitation of natural resources and the desire for emancipation of Black bodies. Afro-electronic sound creation becomes transgressive, vital and necessary to break the boundaries of the mental apartheid that continues to divide the country according to colour. But how to produce music without borders? Sound work that transcends borders in today’s global world?
Ici le concept de Panafricanisme dans l’univers de sa pratique sonore musicale représente un espace de création noire sans limite où l’artiste Mo Laudi invite à chanter, danser, voyager pour « ressusciter les anciens savoirs, symboles, visuels et sons, tout en inventant ceux du futur ». Mo Laudi relie ses propres mix (archives) pour construire un paysage sonore qui forme des parallèles trans-atlantiques connectés via l’Afrique du sud à l’univers, interrogeant l’expérience panafricaine partagée d’appropriation, d’exploitation des ressources naturelles et de désir émancipations des corps noirs. La création sonore Afro-electronic devient transgressive, vitale et nécessaire pour briser les frontières de l’apartheid mental qui continue de diviser le pays selon sa couleur. Mais comment produire une musique sans frontières ? Un travail sonore qui dépasse les frontières dans le monde global actuel ?
Through his non-conformist sound universe, composed of restorative music, tolerance, emancipation and care, the artist Mo Laudi creates a space of benevolence and love around music. For him, listening to sound can evoke images, moments or ideas that can resonate within us. From a sensation via vibrations to the transformation of political bodies. The sensations produced by this sonic practice provides us with perspectives that we would not otherwise have had. It becomes a weapon to fight against discrimination, against the oblivion of minority narratives. It breaks the codes between DJing and artistic sound creation.
A travers son univers sonore anticonformiste, composé de musiques réparatrices, de tolérance d’émancipation, de soin, l’artiste Mo Laudi crée un espace de bienveillance et d’amour autour de la musique. Pour lui une écoute sonore peut évoquer des images, des moments ou des idées qui peuvent résonner en nous. À partir d’une sensation via la vibration jusqu’à la transformation des corps politiques. La sensation de cette pratique sonore nous fournit des perspectives que nous n’aurions pas eues autrement. Elle devient une arme pour lutter contre les discriminations, contre l’oubli des récits issus des minorités. Brise les codes entre le DJing et la création sonore plastique.
Can sound creation (and even art in general) be dissociated from politics or not? Salon Globalisto questions how art, thought as a political entity, can heal and reconcile people despite their different origins and religions, so they only feel happiness and recognition. With sound creations made by and for a community that has been socially rejected by the dominant codes, these artistic productions question how we can heal the deep trauma that continues to plague our societies. The soundscape weaves a tapestry of remixes composed of protest songs made to heal exhausted Black bodies. Mo Laudi’s work explores the politics of reconciliation of human beings with nature, the emancipation of souls, the freedom to protest, the freedom to challenge and create without limit, the overcoming of self, emotional displacement and spirituality. We also note the idea of archiving and “capturing” moments, impressions, sensations, intuitions.
La création sonore peut-elle (et même l’art en général) être dissociable ou non de la politique ? Le projet artistique Salon Globalisto questionne la manière dont l’art, penser comme un corps politique peut soigner et réconcilier les individus malgré leur origine et religions différentes, afin que les gens ressentent seulement du bonheur et de la reconnaissance. Avec des créations sonores faites par et pour une communauté socialement rejetée par les codes dominants, ces productions artistiques interrogent comment nous pouvons guérir le traumatisme profond qui continue à gangrener nos sociétés. Le paysage sonore tisse une tapisserie de remix composée de chants de révolte guérisseurs de corps noirs épuisés. Le travail de l’artiste Mo Laudi explore la politique de réconciliation des êtres humains avec la nature, l’émancipation des âmes, la liberté de protester, la liberté de contester et de créer sans limite, le dépassement de soi, le déplacement émotionnel et la spiritualité. On note également l’idée d’archiver et de « capturer » des instants, des impressions, des sensations, des intuitions.
What do I mean by sound creation in Mo Laudi’s work? Is it an assemblage of sounds, voices, songs, noises, music, silences, screams, vibrations and rhythms? Engaged sound creation is a means to convey ideas, to write sonic anti-establishment protest narratives, whose lyrical themes are associated with an immediate desire for social or political change. Sound creation, thought of as a decolonial emancipation tool, is placed at the service of a cause. Thought of as a decolonial practice, the production of sound becomes a discipline, a tool for reconstructing physical narratives punctuated by deconstruction and repair. Fervently celebrating the fathers and heroes of independent nations and highlighting the roots of musical memory of pan-Africanism, it has the transformative power to liberate.
Qu’est-ce que j’entends par création sonore dans le travail de Mo Laudi? Est-ce l’assemblage des sons, des voix, des chants, des bruits, des musiques, des silences, des cris, des vibrations et les rythmes ? La création sonore engagée est un moyen de véhiculer ses idées, d’écrire ses récits sonores qualifiés de protestataire ou contestataire dont les thèmes lyriques sont associés à une envie immédiate de changement social ou politique. La création sonore, pensée comme un outil d’émancipation décolonial se met au service d’une cause. Pensée comme une pratique décoloniale, cette production sonore devient une discipline, un outil de reconstruction de récits corporels rythmer par la déconstruction et la réparation. Elle se transforme en pouvoir de libération en célébrant avec ferveur les noms des pères et des héros de la nation, constituant la racine d’une mémoire musicale du panafricanisme.
Mo Laudi denounces all vestiges of “colonialism and capitalism” and has a tendency to refocus on rhythms and sounds that are considered more “authentic” to generate and create a new world through music. In this Salon Globalisto project, he attempts to orchestrate and, above all, to enlist activist artists in the revolutionary score he has compiled. Salon Globalisto addresses different circulations of artistic practice within cultural and activist worlds, both local and global. It seeks to unpack how the identification as a “committed artist” can constitute both an opening towards other networks, but also a trap that leads artists to bypass it seeking emancipation. The contemporary artists Mo Laudi has brought together put in place different strategies of circumvention within their artistic practice, revealing multiple social affiliations ranging from a certain economic and cultural elite to more working-class environments. These ruptures correspond to a desire to extract themselves from a milieu in which they have been categorised and an ambition to go beyond the boundaries to which they have been assigned. This concept of the Salon Globalisto claims to be a way of escaping from a monotonous, discriminated and formatted solitary life. It transcends bodies. It teaches us to unlearn our ways of doing things, of living in commun. It expresses a way of “making the world” (Faire Monde) – a pan-Africanist utopia.
Mo Laudi fustige tous les vestiges du « colonialisme et du capitalisme » et accepte de se recentrer sur des rythmes et sonorités jugés plus « authentiques » à travers l’élaboration et la création d’un monde nouveau à travers la musique. Dans ce projet Salon Globalisto, il tente d’orchestrer et surtout d’enrôler les artistes actifs au profit de sa partition révolutionnaire qu’il construit dans le cadre de cette exposition. Le Salon Globalisto aborde différentes circulations d’écriture artistiques au sein de mondes culturels et militants, locaux comme globaux. Il cherche à comprendre de quelle manière la catégorie d’« artiste engagé » peut constituer à la fois une ouverture vers d’autres réseaux, mais aussi une forme d’enfermement conduisant ces artistes à la contourner pour s’en émanciper. Les artistes contemporains convoqués mettent en place différentes stratégies de contournement au sein de leur pratique artistique, laissant entrevoir des appartenances sociales multiples allant d’une certaine élite économique et culturelle à des milieux plus populaires. Ces ruptures correspondent à une volonté de s’extraire d’un milieu dans lequel ils ont été catégorisés et une ambition de dépasser les frontières auxquelles ils ou elles ont été assigné(e)s. Ce concept de Salon Globalisto se revendique comme un mode échappatoire d’une vie solitaire monotone, discriminée et formatée. Il transcende les corps. Il apprend à désapprendre nos façons de faire, de vivre en communauté. Il exprime une manière de Faire Monde—une utopie panafricaniste.
1. | ↑ | Edouard Glissant, Introduction to a Poetics of Diversity, 1996. |
2. | ↑ | Edouard Glissant, Introduction à une Poétique du Divers, ed. Gallimard, 1996. |